Bonjour à tous,
L'aéroport d'Orly engendre des nuisances importantes qui affectent un grand nombre de personnes en région parisienne. Si, à sa création, on ne doutait pas que l'aéroport resterait bien à l'écart des zones densément peuplées (les premiers vols à Orly remontent à près d'un siècle, en 1918 !), depuis, le développement urbain l'a manifestement rejoint, encerclé et dépassé (cet aéroport n'est en effet qu'à 14 km de Paris, et dans une partie de l'Ile-de-France qui s'est considérablement développée et qui continue de le faire à grande vitesse). En conséquence, même si, à l'origine, c'était difficile de le prévoir, il est manifeste, et depuis longtemps maintenant, que l'aéroport d'Orly n'est plus implanté à un endroit adéquat.
Car les nuisances qui en découlent sont malheureusement importantes : pour les personnes âgées, pour les plus jeunes et pour les adultes aussi, le bruit des avions à l'atterrissage et au décollage perturbe le sommeil et dégrade considérablement la qualité de vie en journée. A ceci se rajoute la pollution aérienne, les différents risques induits (en cas de crash bien entendu, mais aussi en matière routière, par exemple avec la chaussée de la bretelle A-126), la perte de valeur des propriétés alentour et la diminution sensible de l'attractivité des communes environnantes, conduisant à leur paupérisation progressive.
Devant l'ampleur des nuisances et le nombre de personnes touchées, dès 1968 une décision ministérielle a mis en place un couvre-feu nocturne (de 23h30 à 6h du matin). Puis, en 1994, le nombre des créneaux attribuables a dû être limité (à 250 000 par an, dans le but d'obtenir au plus 200 000 mouvements aériens par an ; il y en a eu pourtant pas moins de 228 000 en moyenne ces dernières années).
Près d'un demi-siècle s'est maintenant écoulé depuis la mise en place de ce couvre-feu, années pendant lesquelles l'acceptabilité sociale de cet aéroport a continué de se dégrader. Sur deux départements, plus de 45 communes s'en plaignent, et pas moins de 100 associations ont été créées pour lutter contre les nuisances qu'il induit.
Il est temps aujourd'hui de rééquilibrer les conditions d'exploitation de l'aéroport en faveur des riverains, toujours plus nombreux à souffrir de ses nuisances.
Une telle mesure consisterait à augmenter de 90 minutes la durée du couvre-feu quotidien, dès lors actif de 23h à 7h (i.e. plus proche de permettre aux riverains une nuit correcte) et d'agir aussi sur la fréquence des mouvements aériens.
Si on restait à densité de créneaux constante, on passerait à 228000*(23-7)/(23.5-6), soit 208 500 créneaux effectifs environ. L'objectif étant de réduire l'inconfort des riverains, un maximum de 200 000 créneaux serait à retenir - ce n'est rien de plus que celui qui était déjà visé en 1994.
D'où la proposition suivante : passer le couvre-feu quotidien de 23h à 7h, et le nombre de mouvements aériens à un maximum de 200 000 par an.
Cela ne constituera une révolution ni pour les uns ni pour les autres, mais améliorera quand même le quotidien perturbé de centaines de milliers de personnes dans tout le sud francilien.
Il est possible que la rentabilité de l'aéroport en soit affectée (une raison de plus pour en freiner les investissements), mais de toute façon les solutions indolores pour cet aéroport ont été depuis longtemps épuisées, et les riverains n'ont plus guère de souplesse.
Les moyens pour appuyer cette extension du couvre-feu seraient tout à fait classiques : une fois cette proposition discutée, amendée et jugée suffisamment consensuelle et mobilisatrice, il s'agirait d'une part de mettre en place une pétition qui serait remise aux parties prenantes et aux décideurs, et d'autre part d'obtenir l'appui officiel d'un grand nombre des communes victimes de ces nuisances, en identifiant au moins une personne résidant dans chaque commune affectée, en charge de dialoguer avec les instances locales et d'obtenir leur soutien public.
Plus généralement, une telle réduction des nuisances peut probablement être considérée comme un clou de plus dans le cercueil de l'aéroport d'Orly - sachant que le principal d'entre eux, et de loin, remonte à l'instauration du couvre-feu, il y a de cela cinq décennies. Il semble de toute façon difficilement imaginable que des pistes puissent durablement se maintenir à Orly, pour la même raison qu'un aéroport situé à Montparnasse n'aurait pu être toléré indéfiniment.
La densification urbaine s'accélérant (par exemple côté Essonne avec l'arrivée, dans le cadre du projet Paris-Saclay, de plusieurs milliers de ménages plutôt aisés et en recherche d'un cadre de vie agréable), il n'y a guère de doute que la fronde locale s'intensifie, avec des riverains disposant de réseaux influents et probablement plus politiquement impliqués.
Difficile de dire aujourd'hui si la somme des revendications des populations sera suffisante pour obtenir à relativement court terme le départ de cet aéroport malencontreusement placé, ni quelle solution sera privilégiée pour cela (un autre aéroport, cette fois-ci implanté à une distance suffisante et desservi par un train rapide ? Le maintien des infrastructures existantes mais le déport des pistes ? Une autre solution ?).
Mais peut-être que ce départ prévisible sera avant tout provoqué par la promesse de valeur que constitue l'emprise foncière massive de l'aéroport (plus de 1 500 hectares, l'équivalent d'une ville comme Nancy), un gisement d'espace exploitable majeur et à peu près introuvable à cette distance de Paris ; un espace dont la valeur est aujourd'hui essentiellement grevée... par la présence de l'aéroport lui-même !
Entre une telle plus-value foncière latente, la mobilisation croissante des riverains contre ces nuisances, et des conditions d'exploitation qui en conséquence seront toujours plus problématiques, il est de plus en plus difficile d'imaginer un avenir durable pour l'aéroport d'Orly. Dans ce contexte, l'extension proposée ici pour le couvre-feu constitue un nouveau pas raisonnable préparant un urbanisme futur qui soit socialement acceptable, c'est-à-dire intégrant le départ inéluctable de cet aéroport.